nunc est bibendum

Edouard Michelin, PDG du groupe, s’est noyé au large de l’île de Sein Par Par Cécile AZZARO ven 26 mai, 23h59

BREST (AFP) – Le PDG du groupe Michelin Edouard Michelin s’est noyé vendredi au large de l’île de Sein (Finistère), dans le naufrage du bateau sur lequel il était parti pêcher.

Le PDG du numéro un mondial de pneumatiques était sorti en mer tôt vendredi matin avec le président du comité des pêches d’Audierne (sud du Finistère), Guillaume Normant, pour pêcher le bar de ligne dans le raz de Sein, lorsque le bateau de M. Normant, un petit fileyeur-ligneur de 8,50 m baptisé Liberté, a coulé dans des conditions encore inexpliquées.

Le corps de M. Michelin (Paris: FR0000121261 – actualité) , 43 ans, a été repêché flottant au milieu de casiers de pêche à 10 km au nord de Sein, et les recherches se sont poursuivies jusqu’à la nuit pour retrouver le corps de M. Normant, ainsi que des débris de l’épave du bateau.

Le président Jacques Chirac a exprimé vendredi soir sa « très grande tristesse » après la disparition brutale du patron de Michelin, tout comme le Premier ministre Dominique de Villepin qui a salué un « grand industriel » et un « remarquable responsable d’entreprise ».

Le ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy a déploré la « perte de l’une des figures montantes de l’économie française » et le ministre de l’Economie et des Finances Thierry Breton a rendu hommage à « un dirigeant dynamique et clairvoyant ».

Le raz de Sein, entre la pointe du Raz et l’île de Sein, est l’un des endroits les plus dangereux de la côte bretonne, mais aussi l’un des plus prisés pour la pêche au bar de ligne, qui s’effectue à bord de petites embarcations.

« C’est une zone à risques où seuls des professionnels avertis peuvent pêcher. Il y a des rochers, des courants, c’est une vrai lessiveuse », a souligné le commandant Figue.

L’alerte avait été donnée à 15H00 au CROSS Corsen, lorsque des professionnels du port d’Audierne ont constaté l’absence du Liberté, qui aurait dû rentrer à 14H00.

Un patrouilleur de la Marine nationale, deux vedettes de la SNSM et des Douanes, une dizaine de bateaux de pêche ainsi qu’un hélicoptère de la Sécurité civile ont participé aux recherches, ainsi qu’un hélicoptère Super Frelon de la Marine Nationale. Les recherches devaient être interrompues à la tombée de la nuit pour reprendre samedi vers 07H00.

Le décès d’Edouard Michelin est « une douleur pour sa famille ainsi que pour les 130.000 salariés de Michelin dans le monde », a réagi vendredi soir l’entreprise, dont le siège est à Clermont-Ferrand.

« Conformément aux statuts de Michelin, Michel Rollier, co-gérant en exercice, assurera la continuité de la direction du groupe », a-t-elle précisé.

Très ému, le directeur de la compétition de Michelin, Frédéric Henry-Biabaud, a indiqué que la firme prendrait part comme prévu dimanche au Grand prix de Formule 1 de Monaco malgré son « immense tristesse ». « J’espère que nous allons gagner », a-t-il ajouté.

Co-gérant du groupe depuis 1991, Edouard Michelin avait pris en juin 1999 la suite de son père François à la tête de l’entreprise, où il était entré en 1985 à l’âge de 22 ans.

Marié et père de six enfants, Edouard Michelin était féru de théologie, de chants grégoriens et de marche en montagne.

Michelin, numéro un mondial du secteur avec environ 20% du marché, commercialise dans plus de 170 pays ses produits conçus dans des centres de technologies en France, aux Etats-unis, et au Japon. En 2004, le manufacturier a produit 194 millions de pneumatiques dans 75 sites répartis dans 19 pays.

4 réflexions sur « nunc est bibendum »

  1. Décès E. Michelin: au petit matin, la stupéfaction des ouvriers de Clermont
    Par Par Guillaume KLEIN

    L’entrée de l’usine de Michelin à Clermont-Ferrand, le 26 mai 2006
    Agrandir la photo
    CLERMONT-FERRAND (AFP) – "Je viens de l’apprendre", "Ah bon ? Ce n’est pas croyable, vous me l’apprenez": en chemin pour l’usine, au petit matin, des ouvriers des usines Michelin (Paris: FR0000121261 – actualité) de Clermont-Ferrand ont appris avec stupéfaction le décès accidentel, vendredi, de leur patron, Edouard Michelin.

    Quatre heures trente. Alors que la nuit enveloppe toujours la capitale auvergnate, les ouvriers de la relève de 05H00 s’approchent, un à un, du site de Cataroux. Horaire décalé oblige, ils n’ont la plupart appris la nouvelle, annoncée durant la soirée de vendredi, qu’au réveil.

    "Je viens de l’apprendre, comme beaucoup", confirme Claude, qui se présente au comptoir du bar l’Estoril, à deux pas du grand portail d’entrée. "D’habitude je regarde les infos mais, hier, j’étais fatigué. C’est triste, si jeune", poursuit ce quadragénaire, salarié de Michelin Clermont-Ferrand depuis 12 ans.

    Devant ce même comptoir, ses collègues sont eux aussi hagards et les mots sortent au compte-goutte. "C’est un peu dur d’apprendre ça au lever. Il faut le temps de réaliser", explique Didier, 50 ans, les yeux dans le vide.

    Attablés, Daniel et Rodrigues, plus de 60 ans de "Bibendum" à eux deux, ont le nez dans l’édition du jour de La Montagne. La phrase – "La disparition d’un grand patron" – barre la Une du quotidien régional.

    "On ressent de la tristesse, évidemment. C’était un patron très sérieux, un bon patron. On va sûrement avoir une réunion en interne", commente Daniel, qui travaille à Cataroux sur la fabrication des pneus haut de gamme.

    Devant les grilles de l’usine, François, 35 ans, a tant de mal à réaliser qu’il se méprend: "François Michelin, c’était un grand monsieur… Vous voulez dire son fils ? Ce n’est pas possible, c’est encore plus surprenant".

    Marie, la soixantaine, chargée de vendre le journal devant l’entrée du site, est logée à la même enseigne que ces ouvriers. "On m’a donné un tas de journaux plus gros, je n’ai pas compris tout de suite", note-t-elle.

    "43 ans, marié, six enfants. Vous vous rendez compte ? C’est vraiment malheureux", résume Patrice. Lui, un des rares à avoir entendu la nouvelle la veille, ne travaille plus chez Michelin. Mais l’émotion est là et les souvenirs reviennent.

    "J’ai bien connu son père, je le vois encore parfois à la messe à Chamalières", confie-t-il.

    Certains, bien que marqués, évoquent leur opinion nuancée à l’égard du "patron". "Il était un peu plus strict que son père. C’était parfois plus dur", lâche Luis, un des nombreux ouvriers d’origine portugaise.

    "Il y a eu pas mal de changements avec lui. Mais personne ne lui souhaitait du mal. Les ouvriers compatissent. Ce n’est pas un âge pour mourir", précise Brigitte, propriétaire du bar l’Estoril.

    Tous, en tous les cas, ne cachent pas leur inquiétude pour l’avenir. "Michelin, c’est une maison familiale. C’est Clermont. Maintenant on peut se demander si ça va le rester", soupire Rodrigues. "Michel Rollier (le co-gérant en exercice, appelé à assurer continuité de la direction du groupe), je ne connais pas. On ne l’a jamais vu", poursuit-il.

    "Avec (Edouard Michelin), ça +tournait+. Michelin, ça a toujours été dirigé par +un Michelin+, relève Claude. Là, on ne sait pas comment ça va se passer".

  2. Clermont-Ferrand, une ville marquée depuis plus d’un siècle par Michelin
    Par Par Laure Brumont
    sam 27 mai, 14h09

    CLERMONT-FERRAND (AFP) – Le groupe de pneumatiques Michelin (Paris: FR0000121261 – actualité) , seule entreprise du CAC 40 (Paris: actualité) à conserver son siège en province, marque depuis plus d’un siècle de son empreinte la capitale auvergnate, son tissu social et même sportif.

    La première usine, installée en 1889 à Clermont-Ferrand place des Carmes Déchaux, existe toujours: à l’origine, 52 ouvriers y travaillent à la fabrication de patins de frein pour vélo.

    En 1891, est déposé le premier brevet de pneu, qui accompagne alors le développement des bicyclettes avec le début de la civilisation des loisirs. Suit une série d’inventions marquantes, mises à l’honneur lors des premières courses cyclistes et automobiles d’avant-guerre.

    Parallèlement à la croissance de son entreprise, le fondateur Edouard Michelin se lance très vite dans de grands programmes paternalistes à l’égard de ses ouvriers. La société figure notamment parmi les premières à leur verser des allocations familiales.

    Des usines, des écoles, des coopératives et des cités-jardins fleurissent, marquant le tissu urbain de la ville, notamment celui du quartier de Montferrand.

    Dans le souci de distraire ses ouvriers et de leur communiquer le goût de l’effort physique, Marcel Michelin y crée en 1911 l’Association sportive Michelin (ASM (Milan: ASM.MI – actualité) ), ancêtre du club omnisports de la ville, et notamment de son équipe de rugby: le parc des Sports lui est dédié.

    Le nombre d’ouvriers ne cesse de croître et, jusqu’aux années 70, la cité est même appelée "Michelin-ville". L’entreprise y compte alors 30.000 employés.

    A l’époque, quasiment chaque famille clermontoise compte parmi ses membres un "Bib", comme se surnomment les salariés pour rappeler l’emblème du groupe, le fameux Bibendum, dessiné à partir d’un empilement de pneus et qui a fêté ses cent ans en 1998.

    Aujourd’hui, le poids de la manufacture au sein de la ville a diminué mais Michelin demeure indissociable de Clermont-Ferrand, qui reste son centre névralgique et administratif.

    Et même si "plus que" 15.000 personnes travaillent encore pour l’entreprise, dont seulement la moitié dans la production, Michelin continue de faire partie du quotidien des Clermontois.

    Sont toujours visibles les pistes de roulage en forme d’énormes tremplins, autrefois utilisées pour tester la résistance des pneus, et les cheminées en brique rouge des quatre usines sur les sept sites encore présents en ville. Et bien que les cités ouvrières aient été vendues aux HLM, l’entreprise continue de financer une école d’une cinquantaine d’élèves en bac professionnel et BEP.

    Pour rajeunir l’image de la société et confirmer son attachement à la ville, un nouveau siège social, situé sur le site historique de la première usine, a été inauguré durant l’été 2000 par Edouard Michelin.

    Tel un symbole, l’immeuble en verre protège en son hall des hévéas, dont la sève est à l’origine de la matière première du pneumatique.

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